**Le ministre de l’intérieur, qui cite la dirigeante d’extrême droite italienne, Giorgia Meloni, en exemple, entend fixer des objectifs aux préfets et remplacer la circulaire Valls de 2012, qui permet de régulariser 30 000 personnes chaque année.**
En dépit des rumeurs qui ont précédé sa formation, le gouvernement de Michel Barnier n’a pas ressuscité un ministère de l’immigration tel qu’il avait été créé sous Nicolas Sarkozy entre 2007 et 2010. Mais à Place Beauvau, mardi 8 octobre, Bruno Retailleau a parlé immigration, immigration et immigration aux vingt et un préfets qu’il avait conviés – ceux des départements qui concentrent 80 % des mesures d’éloignement. Une « réunion de travail » qui en a précédé une autre, où l’ensemble des préfets ont pu écouter le ministre de l’intérieur développer ses cinq priorités, la première et la plus détaillée étant l’immigration, suivie de la sécurité, l’islam politique, l’Etat territorial et la sécurité civile.
« Il a dit qu’il voulait répondre à la volonté du peuple et que ce qui compte c’est le résultat du premier tour des législatives », rapporte un des participants, sous le couvert de l’anonymat, comme tous ceux qui ont bien voulu confier au Monde le contenu de ces échanges. Le 30 juin, c’est le Rassemblement national qui est arrivé en tête des suffrages, avant que le front républicain ne le relègue en troisième position lors du second tour, le 7 juillet.
Alors que son prédécesseur Place Beauvau, Gérald Darmanin, pourtant issu des rangs des Républicains comme lui, proposait d’être « méchant avec les méchants, gentil avec les gentils », M. Retailleau a martelé aux préfets son souhait de réduire l’immigration y compris légale, dans un contexte où la délivrance de titres de séjour en France suit une tendance durable à la hausse, sous l’effet de l’immigration étudiante, mais aussi professionnelle et humanitaire.
**Rendre des comptes**
Conscient qu’en l’absence de majorité parlementaire, ses marges de manœuvre se situent plutôt du côté réglementaire que législatif, le ministre a annoncé deux futures circulaires. La première s’apparente à une directive de pilotage des préfectures, par l’assignation d’objectifs. « Il demande aux préfets de lui rendre des comptes et de lui remonter des tableaux de bord sur la hausse des expulsions et la baisse des régularisations », explique un préfet.
Sur les expulsions, le ministre leur a demandé d’utiliser les dispositions introduites par la loi sur l’immigration de janvier 2024, qui lèvent un certain nombre de protections limitant les possibilités d’éloignement pour plusieurs catégories d’étrangers (tels que ceux arrivés en France avant l’âge de 13 ans).
Quant aux régularisations, elles feront l’objet de la seconde circulaire annoncée par le ministre, pour remplacer celle actuellement en vigueur. Connu sous le nom de « circulaire Valls », ce texte de 2012, inégalement appliqué sur le territoire, détermine les critères de régularisation des étrangers sans papiers et permet à peu ou prou 30 000 personnes d’obtenir un titre de séjour chaque année, en raison de leur vie privée et familiale en France – c’est le cas notamment des parents d’enfants scolarisés depuis trois ans – ou du travail salarié qu’elles exercent.
Depuis l’arrivée au pouvoir d’Emmanuel Macron en 2017, les gouvernements successifs n’avaient pas entrepris de revoir ce cadre, jugé imparfait, mais qui permet une régularisation discrète, à la différence des grandes opérations de régularisation décidées à intervalles régulières à partir des années 1970.
Diplomatie migratoire
Devant les préfets, M. Retailleau a annoncé mardi qu’il y aurait un texte de remplacement plus court et plus clair. Il n’a pas du tout évoqué la disposition de la loi sur l’immigration censée simplifier la régularisation des travailleurs dans les métiers en tension – et qui attend depuis des mois, pour être opérationnelle, l’actualisation de la liste desdits métiers en tension. En revanche, le ministre a insisté sur l’exigence que devraient avoir les préfets sur la « maîtrise du français » des candidats à la régularisation et leur « assimilation des valeurs » de la société française.
Autre levier identifié par M. Retailleau pour limiter les flux : la diplomatie migratoire. Le ministre a cité en exemple le modèle italien façonné par la cheffe du gouvernement post-fasciste, Giorgia Meloni, à travers notamment des protocoles de coopération signés avec la Tunisie, pays de départ et de transit des personnes migrantes. M. Retailleau a répété à ce titre son intention d’utiliser divers leviers pour obtenir plus de coopération des pays d’origine dans l’éloignement de leurs ressortissants, comme les visas, l’aide au développement ou les accords commerciaux.
Le ministre a répété, ainsi qu’il l’a annoncé dans plusieurs interviews ces derniers jours, qu’il désire s’appuyer sur une coalition de pays comprenant l’Italie et l’Allemagne pour réviser la directive européenne dite « retour » – qui fixe le cadre des expulsions (en obligeant, par exemple, à respecter un délai de départ volontaire) – qu’il a qualifié mardi de « directive pour empêcher les retours » des immigrés. Son souhait est de pouvoir mettre en œuvre plus facilement des mesures coercitives telles que la rétention.
A ce titre, il a redit qu’une loi devrait permettre d’allonger la durée de rétention en France et demandé aux préfets de systématiquement faire appel d’une remise en liberté d’un étranger dont le profil le rend susceptible de troubler l’ordre public.
Lussarc on
J’annonce une circulaire pour réduire Retailleau
SowetoNecklace on
Ooooh, une nouvelle circulaire sur l’admission exceptionnelle au séjour. J’ai hâte de la comparer avec la circulaire Valls, ça pourrait changer pas mal de boulot pour mes anciens collègues de préfecture.
Omochanoshi on
>Autre levier identifié par M. Retailleau pour limiter les flux : la diplomatie migratoire. Le ministre a cité en exemple le modèle italien façonné par la cheffe du gouvernement post-fasciste, Giorgia Meloni, à travers notamment des protocoles de coopération signés avec la Tunisie, pays de départ et de transit des personnes migrantes. M. Retailleau a répété à ce titre son intention d’utiliser divers leviers pour obtenir plus de coopération des pays d’origine dans l’éloignement de leurs ressortissants, comme les visas, l’aide au développement ou les accords commerciaux.
Rien de tout ça n’est dans le périmètre de son portefeuille ministériel.
Symphoniedesaucisses on
Et donc, quels bénéfices le Français moyen tirera-t-il de cette décision?
eclairdeminuit on
> une coalition de pays comprenant l’Italie et l’Allemagne
L’Allemagne ? Ils ont pas une coalition de centre gauche qui déteste Meloni ?
6 Comments
**Le ministre de l’intérieur, qui cite la dirigeante d’extrême droite italienne, Giorgia Meloni, en exemple, entend fixer des objectifs aux préfets et remplacer la circulaire Valls de 2012, qui permet de régulariser 30 000 personnes chaque année.**
En dépit des rumeurs qui ont précédé sa formation, le gouvernement de Michel Barnier n’a pas ressuscité un ministère de l’immigration tel qu’il avait été créé sous Nicolas Sarkozy entre 2007 et 2010. Mais à Place Beauvau, mardi 8 octobre, Bruno Retailleau a parlé immigration, immigration et immigration aux vingt et un préfets qu’il avait conviés – ceux des départements qui concentrent 80 % des mesures d’éloignement. Une « réunion de travail » qui en a précédé une autre, où l’ensemble des préfets ont pu écouter le ministre de l’intérieur développer ses cinq priorités, la première et la plus détaillée étant l’immigration, suivie de la sécurité, l’islam politique, l’Etat territorial et la sécurité civile.
« Il a dit qu’il voulait répondre à la volonté du peuple et que ce qui compte c’est le résultat du premier tour des législatives », rapporte un des participants, sous le couvert de l’anonymat, comme tous ceux qui ont bien voulu confier au Monde le contenu de ces échanges. Le 30 juin, c’est le Rassemblement national qui est arrivé en tête des suffrages, avant que le front républicain ne le relègue en troisième position lors du second tour, le 7 juillet.
Alors que son prédécesseur Place Beauvau, Gérald Darmanin, pourtant issu des rangs des Républicains comme lui, proposait d’être « méchant avec les méchants, gentil avec les gentils », M. Retailleau a martelé aux préfets son souhait de réduire l’immigration y compris légale, dans un contexte où la délivrance de titres de séjour en France suit une tendance durable à la hausse, sous l’effet de l’immigration étudiante, mais aussi professionnelle et humanitaire.
**Rendre des comptes**
Conscient qu’en l’absence de majorité parlementaire, ses marges de manœuvre se situent plutôt du côté réglementaire que législatif, le ministre a annoncé deux futures circulaires. La première s’apparente à une directive de pilotage des préfectures, par l’assignation d’objectifs. « Il demande aux préfets de lui rendre des comptes et de lui remonter des tableaux de bord sur la hausse des expulsions et la baisse des régularisations », explique un préfet.
Sur les expulsions, le ministre leur a demandé d’utiliser les dispositions introduites par la loi sur l’immigration de janvier 2024, qui lèvent un certain nombre de protections limitant les possibilités d’éloignement pour plusieurs catégories d’étrangers (tels que ceux arrivés en France avant l’âge de 13 ans).
Quant aux régularisations, elles feront l’objet de la seconde circulaire annoncée par le ministre, pour remplacer celle actuellement en vigueur. Connu sous le nom de « circulaire Valls », ce texte de 2012, inégalement appliqué sur le territoire, détermine les critères de régularisation des étrangers sans papiers et permet à peu ou prou 30 000 personnes d’obtenir un titre de séjour chaque année, en raison de leur vie privée et familiale en France – c’est le cas notamment des parents d’enfants scolarisés depuis trois ans – ou du travail salarié qu’elles exercent.
Depuis l’arrivée au pouvoir d’Emmanuel Macron en 2017, les gouvernements successifs n’avaient pas entrepris de revoir ce cadre, jugé imparfait, mais qui permet une régularisation discrète, à la différence des grandes opérations de régularisation décidées à intervalles régulières à partir des années 1970.
Diplomatie migratoire
Devant les préfets, M. Retailleau a annoncé mardi qu’il y aurait un texte de remplacement plus court et plus clair. Il n’a pas du tout évoqué la disposition de la loi sur l’immigration censée simplifier la régularisation des travailleurs dans les métiers en tension – et qui attend depuis des mois, pour être opérationnelle, l’actualisation de la liste desdits métiers en tension. En revanche, le ministre a insisté sur l’exigence que devraient avoir les préfets sur la « maîtrise du français » des candidats à la régularisation et leur « assimilation des valeurs » de la société française.
Autre levier identifié par M. Retailleau pour limiter les flux : la diplomatie migratoire. Le ministre a cité en exemple le modèle italien façonné par la cheffe du gouvernement post-fasciste, Giorgia Meloni, à travers notamment des protocoles de coopération signés avec la Tunisie, pays de départ et de transit des personnes migrantes. M. Retailleau a répété à ce titre son intention d’utiliser divers leviers pour obtenir plus de coopération des pays d’origine dans l’éloignement de leurs ressortissants, comme les visas, l’aide au développement ou les accords commerciaux.
Le ministre a répété, ainsi qu’il l’a annoncé dans plusieurs interviews ces derniers jours, qu’il désire s’appuyer sur une coalition de pays comprenant l’Italie et l’Allemagne pour réviser la directive européenne dite « retour » – qui fixe le cadre des expulsions (en obligeant, par exemple, à respecter un délai de départ volontaire) – qu’il a qualifié mardi de « directive pour empêcher les retours » des immigrés. Son souhait est de pouvoir mettre en œuvre plus facilement des mesures coercitives telles que la rétention.
A ce titre, il a redit qu’une loi devrait permettre d’allonger la durée de rétention en France et demandé aux préfets de systématiquement faire appel d’une remise en liberté d’un étranger dont le profil le rend susceptible de troubler l’ordre public.
J’annonce une circulaire pour réduire Retailleau
Ooooh, une nouvelle circulaire sur l’admission exceptionnelle au séjour. J’ai hâte de la comparer avec la circulaire Valls, ça pourrait changer pas mal de boulot pour mes anciens collègues de préfecture.
>Autre levier identifié par M. Retailleau pour limiter les flux : la diplomatie migratoire. Le ministre a cité en exemple le modèle italien façonné par la cheffe du gouvernement post-fasciste, Giorgia Meloni, à travers notamment des protocoles de coopération signés avec la Tunisie, pays de départ et de transit des personnes migrantes. M. Retailleau a répété à ce titre son intention d’utiliser divers leviers pour obtenir plus de coopération des pays d’origine dans l’éloignement de leurs ressortissants, comme les visas, l’aide au développement ou les accords commerciaux.
Rien de tout ça n’est dans le périmètre de son portefeuille ministériel.
Et donc, quels bénéfices le Français moyen tirera-t-il de cette décision?
> une coalition de pays comprenant l’Italie et l’Allemagne
L’Allemagne ? Ils ont pas une coalition de centre gauche qui déteste Meloni ?